You don't Fool Me Ft. Choi Sung Jae

Les humains étaient étranges. Tout en te voulant pour eux dans un esprit de pure contradiction et d'égoïsme, certains cherchaient pourtant à te marier. Dans ce monde où dans un autre le schémas semblait se répéter en vain. D'un côté pour assurer la descendance, pour allier deux pays, de l'autre pour un beau mariage, de belles pages en premières de magasine. Finalement tu n'avais pas bien compris. Ce qui en ressortait, mais que tout le monde taisait; c'était cette envie de ne pas montrer une femme indépendante y arriver. La marier, la conditionner dans une tradition patriarcale et ancestrale pour rassurer, pour bien faire voir.  Pourtant tu considérais que tu ne devais de compte à personne. Que ta réussite était la plus belle preuve pour ces jeunes femmes que rien n'était impossible, qu'aucun homme ne pouvait avoir d'emprise sur elles.

Tu avais connu, cette main serrée autour de ton destin. Ces ficelles qui semblaient dicter ta vie, tes gestes comme si rien ne t'appartenait mais que tu n'étais que le pantin, le jouet d'un puissant être. Pourtant, il n'était pas plus, pas moins que toi. Il avais l'avantage de connaître ce monde, cette ville. Car oui, la plus grand emprise arrivait quand l'ignorance et la peur vous surprenaient. Il était alors facile de faire croire monts et merveilles, de manipuler, de contrôler.
Cette petite fille apeurée, perdue et soulagée d'avoir trouvé un adulte pour l'aider n'était pas responsable de s'être laissée mener par le bout du nez. Elle n'était pas responsable. Elle cherchait à se protéger, à s'évader, à trouver une liberté qu'elle n'avait jamais connu. et elle avait bien fait. Pas un jour tu ne regrettais ta cage dorée. Pas un jour tu n'avais pleuré ce monde qui voulait t'utiliser dans la plus pure de tes innocence. Pas un moment tu n'avais voulu retourné là où cette petite fille n'avait pas son mot à dire, ni droit, ni protection. Là où elle se sentait en danger avec des adultes.

Alors oui, chaque jour tu étais reconnaissante envers ta bravoure, envers toi, d'être arrivée ici. Parce qu'il n'y avait eu que toi. Même dans tes tourments les plus profonds, tes peurs les plus noires. Mais tu te levais dans des draps propres et luxueux, une lumière filtrée par de grandes baies vitrées qui te donnaient l'impression de dominer la ville. Une grosse boule de poil te faisant oublier l'ennui et la solitude. Oui, tu étais reconnaissante et heureuse. Mais tu apprenais peu à peu que tu ne ferais pas tout ce que tu voulais. Dans cette vie, ou dans l'autre. Qu'il fallait se plier. Telle un roseau tu acceptais, tu pliais, délicatement, doucement, pour revenir droite.
Non , ces hommes qu'on allait te présenter n'en savait rien. Et tant mieux. L'effet ne sera que plus grand lorsque tu viendrais, avec toute ton arrogance, ton franc parler et cette froideur. Tu durcissais chacun de tes mots, de tes regards. Ton coeur barricadé, de peur qu'on le trompe, qu'on joue avec sa fragilité. Il restait derrière son armure et tu comptais bien montrer à quel point il était impensable de se marier avec toi.

Parée de tes plus beaux vêtements, bijoux et de ton maquillage le plus sophistiqué mais simple tu quittais ton appartement. L'impression était primordiale. Tu devais montrer l'assurance d'une femme d'affaire, la dureté d'une femme mûre et la confiance d'une reine. Tout ça, rien que pour les leurrer, pour les faire déguerpir.
Et c'est tout ce que tu souhaitais en arrivant en retard au rendez-vous, la tête haute. Le restaurant privatisé tu n'avais pas nombreux choix entre les gens, te permettant de te mettre dans ce rôle qui t'allait comme un gant dès le début. Tu ne t'attendais pas à ce que cette personne soit lui.
Etait ce le même homme ?

C'était étrange... tellement loin de tout ce que j'avais connu, tellement à l'opposé de la vie que je menais, et pourtant. J'étais là, dans cette grande pièce habillée de marbre et de velours, face à celui qui avait passé l'annonce à laquelle j'avais répondu sans une hésitation. Mais dans cette pièce démeusurée, je ne me sentais pas à ma place. La gène irradiait dans mes veines et je peinais à la masquer. « Nerveux ? » demanda-t-il n même temps qu'il s'activait à me parer de ses vêtements. Un costume trois pièce impeccable fait d'un tissu qui devait valoir une fortune. Si je le tâchais ? Ou si je l'abîmais ? En serais-je responsable financièrement ? Quand bien même il était celui qui devait me fournir tous les moyens dont j'avais besoin ? Devant son regard sérieux je me contentais d'afficher un sourire contrit, comme pour acquiescer à sa question, alors qu'intérieurement, je prenais conscience de l'accord que je venais de passer. « Voilà, là c'est parfait, il va falloir faire honneur à mon nom ! » lâcha-t-il. Une plaisanterie qui ne parvint néanmoins pas à me faire rire. Et je repensais à cette petite annonce... ce job trop beau pour être vrai qui avait soudainement frappé à ma porte. Un job qui me donnait l'impression de n'être devenu qu'un pantin, volontairement. D'un geste, il acheva d'ajuster les manches et les boutons de manchette sur mes poignets, et se redressa pour finalement admirer son oeuvre. « Tu es prêt ! Un dernier briefing ? » Je détestais ces mots empruntés à l'anglais, je n'y comprenais rien et ils donnaient un air supérieur à quiconque tentaient de communiquer avec moi de cette manière, mais je retins la réplique et acquiesçais une nouvelle fois. « Ok... il me faut donc un topo complet. Quel genre de femme est-elle ? Ses loisirs ? Ce qu'elle aime ou n'aime pas et surtout... surtout son caractère. » Ses sourcils se froncèrent sur ces derniers mots, marquant ainsi l'importance de la mission que je devais mener. C'était étrange... devoir porter l'identité d'un autre dans le seul but de lui apporter les preuves concrète que l'engagement dont il faisait l'objet lui serait- bénéfique. Mais je repensais alors à la belle somme d'argent qui m'attendait, à l'issue de cet emploi peu commun, je savais que j'en sortirais plus riche.

Une voiture avait été affrétée spécialement pour ce rendez-vous, et uniquement pour moi. Je jouissais soudain d'un statut privilégier, celui d'observer le monde depuis la banquette en cuir confortable d'une voiture luxueuse, celui de contempler les visages fatigués de ceux qui s'entassaient dans un bus... mon bus. J'en eu un pincement au coeur, comme si brutalement je reniais tout ce que j'étais. Mais pour réussir à bien ma mission, je repoussais dans un coin de mon esprit toute les pensées qui étaient susceptible de la mettre en péril. Quelques minutes seulement et le véhicule s'arrêta dans un silence presque religieux, le moteur ronronnant s'éteignit sans plus de bruit et ma portière s'ouvrit sans même que je n'eus à la toucher. Était-ce ça d'être traité comme un roi ? Fouler le tapis de velours de l'hôtel qui m'accueillait presque comme le Messi... Mais les mauvaises habitudes avaient la vie dure, et je dus me faire violence afin d'afficher un air décontracté et asuré. Les portes en verre s'ouvrirent devant moi et je m'engoufrais dans un temple du luxe et de l'indécence en feignant d'y avoir toujours appartenu, je suivais les couloirs ornés d'or et de métaux précieux jusqu'à pousser les deux lourds battants d'acajou d'une salle dont la splendeur me laissait bouche bée. De mes deux yeux je ne pouvais pas même tout voir, tout admirer : des peintures aux voilages, des tapis aux mobilier... jusqu'aux assises des larges fauteuils dans lequels s'installer pour manger semblait devenir un péché. En quelques foulées, on me désigna ma table et je me laissais tomber sur le moelleux de l'assise qui m'était destinée tandis que l'on me gratifiait de révérences et de courbettes que je peinais à accepter. « Mademoiselle va bientôt arriver, je vous prierais de bien vouloir patienter encore un peu. » m'informa-t-il. Sur un simple hochement de tête, il prit alors congé et me laissa avec mes réflexions. Le caractère, les loisirs.... le caractère, les loisirs... Je me répétais inlassablement ces mots comme un mantra, tentant de chasser l'inquiétude qui menaçait de me faire basculer et fuir. Et si elle comprenait ? Et si j'étais arrêté ? Fraude à l'identité ça vaut quoi comme peine ?... Et à mesure que les doutes m'envahissaient, la double porte venait de laisser entrer la raison de ma présence. Il me fallut quelques minutes avant de ne réellement la voir, mais lorsque mon regard se posa sur elle, toutes les questions qui résonnaient dans mon esprit s'envolèrent.

D'un pas léger et gracieux elle rejoignait ma table, et si l'idée qu'elle ait pu venir ici pour un autre se fraya un chemin dans mon subconscient, elle s'évapora aussitôt. Avec maladresse, je me relevais, comme pour l'accueillir, et lui offris un sourire sincère. Celui avec lequel je la saluais, heureux de revoir celle avec qui j'avais partagé quelques snacks. Mais quelque chose était différent... elle. Apprêtée, sa tenue épousait sa silhouette et la mettais en valeur tandis que son maquillage sophistiqué lui donnait un regard bien plus profond que celui que je lui avais connu. Elle était différente, loin, très loin de l'image que j'avais gardé de cette jeune femme au sourire timide. « Bonjour... » tentais-je. « Est-ce que...tu... vous, est-ce que vous voulez vous asseoir ? » Perdu entre le formel et le familier, j'ignorais sur quel pied danser. « J'imagine que c'est avec toi... avec vous, que j'ai rendez-vous... » bafouillais-je en même temps que nous nous installions. La curiosité vibrait dans chacun de mes membres, intrigué de la voir à cet endroit et dans ces vêtements.

Tu ne te doutais pas que derrière ton dos se jouait un jeu dangereux. Tu ne pensais pas faire peur au point qu'on doive engager quelqu'un pour collecter des informations sur toi. Venir, se présenter, jouer à ce jeu de qui fera le mieux. A ce jeu de riche, c'était dans le contrat, dans les corvées de ceux qui avaient la chance de ne manquer de rien matériellement parlant. Qui osait donc contourner ces règles?
Tu n'étais pas totalement honnête non plus, te donnant cet air hautain en plus, laissant ton mauvais caractère prendre le dessus, exagérant les traits, parfois même en mentant sur ce que tu pensais. Le but étant de dégoûté la personne en face de toi. T'éloigner de ces obligations rustres et démodées. Tu souhaitais simplement vivre ta vie comme tu l'entendais. Pas besoin de mari, pas besoin d'être épaulé ou aidé, tant que tu y arrivais. Tes amis étaient là pour te supporter , ton chien également, que demander de plus ? Un de ces riches prétentieux détestant avoir tord, qui ne supportait pas qu'une femme soit au dessus d'eux? Un qui te demande d'arrêter ta société ? Tant de points qui te faisait déjà grincer des dents. Etait ce une blague ? Tu te préparais, comme à une bataille, mais avec élégance. Une bataille de classe, une bataille où l'heureux perdant se verra faire le bonheur de l'autre. S'il y avait quelque chose avec lequel tu ne voulais pas rigoler c'était bien ça : refusant de te réduire à "la femme de". Tu avais ton indépendance, ta vie et personne ne pouvait la bouleverser à son gré.

Le décor, l'ambiance même du restaurant, du lieu, ne t'effrayait. Tu avais cette mauvaise habitude de diner dans ces dorures depuis des années maintenant. L'habitude d'accepter ce verre qu'on te tendait, de verser à de grands noms un verre dans une éthique et une tradition presque répugnante. Et si tu gonflais ta poitrine comme si tout ton courage se retrouvait à un seul endroit, tu n'oubliais pas tout ce que tu avais fait pour arriver ici. Tu n'oubliais pas que la personne derrière cette porte pouvait tout te prendre. En l'espace d'un instant. Qui t'obligeait? Pourquoi te sentais tu si redevable? Si enfermé dans un choix qui t'appartenait pourtant ? Parce que les gens étaient ta réussite, et sans eux tu retombais dans cette ombre qui n'apportait rien. Ombre qu'on oubliait, comme ce vendeur à la supérette. Tu t'en souvenais mais qui d'autre remettrait son nom ? Son visage ? Peut être n'avait il pas la prétention d'en vouloir autant, mais tu n'étais pas ainsi. Et même s'il t'avait marqué par sa simplicité, par ce sourire qui avait retenu ton attention, tu ne voulais pas que ta voix soit de nouveau étouffée. Et malgré toute la confiance que tu avais en toi, cette force presque surhumaine qui laissait les autres penser que tu n'étais rien d'autre qu'un robot, un humain sans sentiment, tu avais peur. Tu étais triste, tu étais en colère et tu voulais crier à l'injustice. Etre forte devant les autres ne voulait pas dire que leurs mots ne blessaient jamais. Que cette histoire de mariage n'avait pas atteint ta fierté, qu'elle n'avait pas brisé l'image que tu tentais d'avoir pour toi même. Pourtant tu devais tout oublier. Tout balayer en poussant la lourde porte, n'attendant pas qu'un des serveurs ne le fasse.

Tes pas résonnaient dans la pièce pratiquement vide qui s'offrait à vous, ton regard droit devant comme s'il te montrait exactement la direction à prendre. Tu te rapprochais de cet homme dont tu n'appréciais rien, sans même le connaître. Bien décidée à le faire plier, à le faire refuser toute demande, s'opposer à être lié à toi. Mais l'espace d'une seconde, peut être même moins, ton pas se fit hésitant, tremblant. Ton coeur sembla manquer un battement et tes sourcils se froncèrent légèrement. Pourquoi était il ici ? Ta poigne se fit plus forte alors sur cette pochette que tu avais emportée comme preuve de ta richesse mais tu ne perdis pas face t'approchant de lui. "Bonjour. Je ne vais pas rester debout lors d'un diner. " Piquante, tu devais le faire te détester. Prenant alors place sur la chaise tu croisais directement les jambes croisant les bras. " Il n'y a pas des dizaines de prétendantes en effet. " Il était loin d'être comme eux. Bizarrement il ne dégageait pas cette sérénité que tous développaient en se sentant supérieur. Au contraire il semblait maladroit, perdu. "Vous n'étiez pas vendeur dans une supérette ? " Autant aller droit au but, tu n'étais pas du genre à tourner autour du pot. " Qui dois je croire ? "

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