trust can't be found in the dark

Effleurant à peine le plastique, le bout de son doigt suivait la ligne coloré, représentant les différents arrêts de métro, alors que dans ses oreilles résonnaient des mélodies à le faire rêver. Ses lèvres bougeaient alors qu’il lisait les noms de chaque station, comme pour se permettre de se rappeler exactement le chemin qu’il était en train de se tracer mentalement. Se déplacer dans Séoul, pour Ha-Neul, relevait d’un défi qu’il avait toujours une immense difficulté à surmonter. La première fois qu’il avait mis les pieds dans ces trains de malheur, il ne savait plus où il devait aller, encore moins comment s’y rendre, et bien qu’il ne s’agissait que de se rendre quelques stations plus loin, le jeune homme avait réalisé l’exploit de se rendre à l’autre bout de la ville. Et considérant qu’aucun son ne quittait sa bouche, demander de l’aide avait été délicat. Depuis ce jour, il planifiait tout dans ses déplacements; il regardait au moins trois fois de suite le numéro de bus qu’il devrait prendre, s’assurait que le GPS de son téléphone portable lui indiquait un chemin clair et simple - puisque même utiliser cette brique technologique était loin d’être simple - et, comme en ce moment, il prenait toujours un bon dix minutes devant les cartes du métro, traçant son chemin plusieurs fois et mémorisant autant que possible le noms et le nombre de stations qu’il aurait à parcourir avant de se diriger vers le quai. Et une fois sur le quai, il ne s’approchait jamais du rebord, pratiquement terrifié à l’idée d’y tomber. Après tout, n’y avait-il pas bon nombre d’histoire d’horreur de personne ayant rencontré la grande faucheuse, soit en s’y jetant délibérément ou en y perdant tout simplement pied? Hors de question qu’un tel malheur croise sa route.

La cacophonie du train qui arrivait couvrit presque la musique qui jouait doucement à ses oreilles, et il se faufila parmi les gens, se glissant entre un petit groupe d’adolescent, et se dirigea jusqu’au fond, là où il savait qu’il y avait une foule beaucoup moins dense. Il pouvait s’appuyer contre la paroi du du métro et respirer, évitant les odeurs de sueurs qui chatouillaient violemment son nez, et les mains beaucoup trop baladeuses qui parfois effleuraient son dos en lui arrachant des frissons presque de dégoût - bien que souvent, ces effleurements n’étaient que de maladresse et ne relevaient pas de mauvaises intentions. Mais ce que Ha-Neul n’avait pas remarqué, c’est qu’il avait attiré l’attention de quelques personnes plutôt mal intentionnées, qui s'approchait lentement de lui et n’attendais que le bon moment. Après tout, le jeune homme était loin d’être fort en muscles, et il affichait sûrement l’apparence classique de l’intello qu’on aimait beaucoup trop embêter, sortant son livre d’histoire aux pages jaunies de son sac, tournant les pages pour reprendre ses annotations. Probablement que sans diversion, il aurait pu continuer sa lecture en toute quiétude. Mais l’exutoire pour ces jeunes mal intentionnés arriva bien vite, bien que personne ne l’avait prévu, alors que brusquement le train s’arrêtait. Le jeune muet en perdit l’équilibre, échappant d’abord son livre avant que son front ne rencontre le dos d’un inconnu, le faisant grimacer puis repousser brusquement. Le message tombe bien vite; un incident sur les rails - le pire cauchemar de Ha-Neul quoi - et les voilà bloqués. On annonce qu’il y en a pour plusieurs heures, mais disons que le jeune homme avait d’autre chose qui méritait son attention.

Avoir eu de la chance, il serait peut-être tombé sur quelqu’un de sympathique, l’excusant pour avoir perdu pied et lui tendant son livre. Mais à la place, il eût droit à un petit groupe, à peine plus jeune que lui, qui furent rallié par celui contre lequel il avait d’abord atterrit, alors qu’il lui ordonnait presque de demander le pardon pour l’avoir ainsi percuté. La réponse de Ha-Neul s’arrêta à un regard noir avant qu’il ne baisse les yeux, à la recherche de son livre et son crayon. Sa réponse ne fît visiblement pas plaisir à son interlocuteur qui s’empressa de l’attraper par l’épaule pour le pousser brusquement contre la parois du train, l’insultant d’une voix assez forte pour que le train entier puisse l’entendre, lui jetant à la figure des vulgarités très imagées, pour la simple et bonne raison que le jeune homme n’avait pas daigné lui répondre.

Trust can't be found in the dark
Ha Neul

J'ai du prendre le métro. J'y suis. Le métro. Le pire endroit du monde. Pour ma part en tout cas. Même si on m'enfermait dans une maison de retraite avec qu des vieux cancéreux à bouffer, je le ferais. Mais le métro. Je suis claustrophobe putain. Et un pote a voulu absolument le prendre et comme jusqu'à présent, j'vais pas plus vite que le métro pour arriver à un endroit, forcément, je me dois de l'accompagner, pour être sûr qu'il va amener son cul d'alcoolique complètement fait à bon port. Depuis quand je suis altruiste moi ? Ah ouais non c'est vrai, c'est pour m'assurer qu'il va pas se rétamer la gueule avant de me rembourser mes deux cents balles. Il me fatigue, il est déjà à moitié mort affalé comme un phoque sur les fauteuils d'une rangée de siège. On est heureusement en dehors des heures de pointe, sinon j'aurais probablement détruit deux trois types un peu trop collants. Mais quand je le vois qui bave sur le siège, je me dis qu'il a la joue qui fusionne avec un tissu où tout le monde a posé son cul. Et par là, on veut bien sur dire les vieux incontinents, les nana qui ont leurs menstruations et les odeurs qui vont avec, les bébés dont la couche fuit du popo, les mecs qui transportent la galle sur eux et les poux. Même la barre en métal que je tiens, parce que je suis resté debout, soyons pas débile, c'est avec un gant. Ne prenez jamais le métro sans gant. Parce que ces balles c'est un laboratoire catégorie 5 à ciel ouvert. T'as la gastro, la grippe, l’herpès, les restes crachas de cancer du poumon ou d'ulcère stomachale, le sida du mec qui s'est branlé sans s'essayer la main ou encore le paludisme d'un mec revenu de Thailande, et toi tu fais quoi après quand tu sors, à un moment de la journée, bah tu frottes l'oeil ou la joue, ou tu mets ton doigt dans ta bouche parce que tu t'es coupé etc. Et vas y qu'après tu chiales à l'hosto parce que tu sais plus comment t'as attrapé ça. Les gants j'vous dis. Dépité , j'attends patiemment que ce foutu métro arrive à bon port, évitant d'observer autour de moi pour n'avoir aucune envie bizarre. Parce que j'en ai en ce moment, sans savoir pourquoi. Ça me plait comme ça me pose problème. Je finis par poser mon dos contre une vitre pas loin de la porte, et j'enfonce mes mains dans mes poches, le nez sous mon masques et la casquette enfoncé sur mon visage. Je me sens imposant à coté de tous ces nains qui dépassent pas le mètre quatre vingt pour la plupart. Le pire dans tout ça c'est que je suis claustrophobe, je vous laisse deviner mon état mental à cet instant. En plus j'ai la dalle, je suis crevé , j'ai mal à ma plaie abdominale, et j'ai envie de pisser. Y'a tout qui me fait chier. Et j'essaie de ne pas sentir toutes ces odeurs corporelles douteuses qui me tuent les hormones, même les pires.

Quand le train s’arrête. Pardon ? Il se fout de ma gueule ? Putain mais il pouvait pas se suicider dans le tunnel d'à coté ce blaireau ? Poésie bonjour ! J'inspire et me masse le haut du nez, pour essayer de faire en sorte de ne rien avoir entendu. Quelques minutes n'y font rien, surtout que je vois un groupe de petits cons s'en prendre à un petit jeune, au minois assez canon j'dois dire. Je vois le livre au sol et le crayon. Et la douceur des mots de ce petit branleur de rebelle pas foutu de se battre un contre un contre lui. Dans l'instant même ça m'excite assez, j'ai envie de me la faire cette grande gueule, contre la paroi du véhicule, mais mon attention se stoppe sur les portes du wagon contre lesquels est le pris-à-parti. Hors de question que je reste ici trois heures. On nous a annoncé trois heures. Qu'ils aillent se branler, je me casse. Je me redresse et avance calmement vers le groupe alors que des gens lambda s'éloignent du conflit. On dirait qu'ils sont contaminés par un virus zombi, vu leur réaction disproportionnée. Je m'arrête derrière le petit con, lui tapant sur l'épaule. Il arrête soudainement ses insultes se retournent les yeux avec un « QUOI CONNARD ! » Mon front rencontre son arête de nez, et je le pousse sèchement sur le coté, l'envoyant s'écraser contre la paroi dans un bruit métallique. « Dégage. » Ma tète va bien, merci. Il n'avait qu'à pas m'insulter. On m'insulte pas. Jamais. Je m'arrête devant le petit brun, le dévisageant , le pousse gentiment sur le coté. Puis je déclenche l'ouverture des portes d'urgence. Automatiquement , l'alarme s'enclenche, et les voyageurs paniquent. "Vous allez fermer vos gueules un peu!" Le chahut se calme. Je veux juste me barrer. Tout est normal, qu'ils posent leur cul sur les sièges et qu'ils attendent comme de gentils moutons. Là dessus , je tire sur les portes avec force et deux autres types viennent me porter mains fortes, ne semblant pas non plus vouloir rester ici. Elles finissent par s'ouvrir et je les vois sortir. De mémoire la précédente station n'est pas loin. Mais eux partent dans l'autre sens. Je les regarde faire à sauter entre les rails. Ils vont se faire griller la gueule à coup sûr. Y'en a bien un qui va marcher dessus. Je me baisse pour ramasser le livre et le colle sur le torse du gamin avant de le pousser un peu plus bas hors du wagon, sur la chaussée de gravillons et de béton. « Allez. On marche. A moins que tu veuilles rester avec eux. » Ils sont un peu contrarié. L'autre pisse le sang sur le sol du wagon, et mon pote ronfle sur un siège à coté d'un gamin qui lui colle sa sucette sur la figure. Ah petit, tu risques tellement gros en faisant ça, je sais pas ce qu'il trimbale comme microbe mais il a déjà gerbé, tu devrais pas mettre ton bonbon là. Tant pis. Il apprend la vie. Et le petit gars que j’entraîne avec moi aussi. Je saute sur la voix et pousse le petit brun vers le bord du tunnel. « Marche pas la d'ssus si tu veux pas finir carbonisé. C'est pas une panne de courant, c'est juste un con qui s'est fait écraser. Avance, on va rejoindre la station d'avant. » Bien sur que c'est un ordre. Je trouve quand même bizarre qu'il ait rien dit. Il a problème à la gorge. C'est ça d'y mettre n'importe quoi aussi, un jour on se fait mal. Allez, on marche. Je sors mon portable et enclenche la torche. Ouais, c'est pas fameux mais ça suffira. Derrière nous on entend le conducteur de la rame qui nous crie de revenir. C'est ça, il va se gratter. Si je reste enfermé la dedans, ça va se faire finir en massacre. Je préfère déambuler la dedans avec un petit cul appétissant, qui peut peu-être même pas appeler à l'aide. Je l'éclaire un peu. «T'as pas de nom ? Ni de langue on dirait. T'es handicapé ? » Oh l'approche de merde et sans aucun délicatesse. Neurone zéro aujourd'hui , j'ai besoin de dormir. Quoi qu'au moins, je saurais ce qu'il en est. Je regarde pas où je marche et forcément je manque de me rétamer. Je me rattrape de justesse et m'arrête pile devant les rails. Putain un peu plus et je sentais le cochon grillé. Je le rééclaire juste après, pour m'assurer qu'il est toujours là, j'ai pas envie de courir aujourd'hui et je regarde aussi ce qui m'a fait trébucher, sauf … que... « Y'a rien.... » bizarre. Je reste immeuble et regarde autour. « Si tu disparais... c'est qu'un truc t'aura bouffé... » Moi. Non. Je sais pas moi, un truc. J'ai jamais exploré le métro de ce monde en dix ans. Cette petite ballade devient soudain une curiosité pour moi.

Tout semblait se passer à la vitesse de la lumière dans l’esprit du jeune homme qui se retrouva bien vite coincé entre la parois du train et des gros bras sans cervelles. Ses yeux se posent sur leur visage, puis sur les gens autours qui ne daignant même pas tenter de s’approcher, comme s’il avait la peste. Cette manie qui le dérangeait toujours chez la population, de se défiler dès que quelque chose semblait dangereux, ou inconfortable. Même si cela signifiait laisser quelqu’un seul et sans défense, face au danger. Parce que c’est bien mieux de laisser un inconnu souffrir seul que de se risquer à aider quelqu’un. Il ignorait pourquoi, mais Ha-Neul avait cette étrange impression de ne pouvoir pardonner les gens autours de lui, comme s’ils lui avaient fait quelque chose, personnellement. S’il savait que tout cela n’était qu’une haine réprimée, venue d’un passé dont il n’arrivait jamais à se rappeler. Mais son sentiment de haine fût bien vite oublié quand un homme attira l’attention des imbéciles qui se croyaient tout permis.

Le jeune étudiant ouvre de grands yeux en voyant l’homme littéralement donner un coup de tête à l’autre. Lui qui croyait que ce genre de choses n’arrivaient que dans des livres ou des films, il affiche un air surpris avant de faire un rapide pas de côté, sursautant, lorsque l’imbécile rencontra la paroi à son tour. Son regard se pose bien vite vers l’homme qui vient de l'assommer, ravalant sa salive au passage. Face à un homme de cette carrure, il faut dire que le jeune homme ne ferait pas le poids si il se décidait à lui taper dessus aussi. Il était bien plus chétif que celui qui venait de se prendre le coup et il n’avait pas vraiment envie de se lancer dans une altercation et se mettre encore plus dans la merde. Et comme il le dévisage comme ça… Cette histoire n’annonce rien de bon. L’homme se rapproche, l’étudiant se raidit… mais rien. Il le pousse doucement pour ouvrir les portes qui se trouvaient près de lui. À nouveau, le regard du plus jeune se promenait sur la foule qui avait commencée à s’agiter dès que l’alarme avait retentie. Mais les clameurs furent bien vite mise sous silence lorsque l’inconnu ordonna le silence avec des mots peu élégants. Ha-Neul fait quelques pas pour s’éloigner, visiblement décidé à ne pas se mêler à cette histoire, au contraire. Il allait jouer les gamins sages pour une fois, rester tranquille et attendre de sortir. Mais le destin avait une idée différente de la sienne, alors que, une fois les portes ouvertes, l’homme attrape son crayon et son livre pour lui mettre entre les bras et ensuite le pousser vers la sortie.

Bien qu’il soit reconnaissant de l’aide apporter par cet inconnu, il n’est pas certain de vouloir s’aventurer ainsi dans les dédales de tunnel sombre avec une personne visiblement violente. Mais il n’est pas trop en position pour dire quoique ce soit… alors il suit les conseils de l’homme, lui emboîtant le pas, sans comprendre pourquoi l’inconnu à décidé de l'emmener comme ça avec lui dans une aventure sous la ville. Il fait bien attention de ne pas mettre le pied sur les rails, s'affairant à mettre ses affaires dans son sac en vitesse pour ne pas être coincé à les traîner dans ses bras jusqu’à ce qu’il revoit la lumière du jour. Visiblement, l’inconnu n’a pas sa langue dans sa poche, l’éclairant bientôt de la lumière de son téléphone pour parler de nouveau, questionnant son manque de réponse. Ha-Neul ne tente même pas d’ouvrir la bouche, s’apprêtant plutôt à faire un mouvement de la main pour montrer sa gorge, lorsque l’autre trébuche presque. Sa main levée s’empare d’un pan de chandail comme si l’étudiant espérait pouvoir le retenir dans sa chute. Heureusement, l’autre ne rencontre pas une mort certaine auprès de l’électricité sur les rails, mais ce n’est certainement pas grâce au jeune homme qui a tenté de le tirer vers l’arrière. Il regarde aussi l’endroit où, finalement, il n’y aucun obstacle, puis relève les yeux vers l’homme lorsqu’il lui parle de nouveau. Oui, c’est ça, se faire bouffer… Par quoi? Bien sûr, il ignore tout de cette personne face à lui. Sincèrement, ils ont plus de risque de se faire écraser par un train ou électrocuté par les rails que de se faire bouffer. Ha-Neul tire un peu sur le chandail qu’il n’a pas lâcher, pour attirer l’attention de son interlocuteur, puis pointe sa gorge avant de faire un pouce vers le bas, tentant de signifier qu’il ne peut pas parler. Une fois cela fait, il replace mieux son sac, puis pointe une pancarte plus loin, signifiant qu’il y a une sortie de secours proche. Il essaye d’être clair, affichant un air interrogateur. Comme s’il lui demandait si c’était par-là qu’il préférait aller. Du moins, il y avait de la lumière, probablement celle des mecs qui avaient foutus le camp avant eux.

Trust can't be found in the dark
Ha Neul

Chacun de ses pas sur le gravier qui entoure les rails résonne doucement dans mes tympans. A une certaine époque, j'aurais pu penser et dire qu'il s'agissait de ses derniers mètres, qu'après ça, son corps s'écraserait au sol, comme une chair encore chaude et massive prête à l'emploi. Mon esprit avant de se prendre les pieds dans un truc qui a disparu ensuite, s'était évadé. Mais je l'ai. Là. Bien réel. J'ai vu un truc putain. Je l'ai vu. Si c'est un rat, je l'écrase du talon et lui éclate la cervelle. D'où il me fait un croche patte. Ma torche du téléphone balaie lentement le long du mur, puis l'autre coté, quand je sens quelque chose après mon haut. Est-ce que cette partie de leur monde s’avérerait plus intéressante que prévu ? Quelconque créature dégueulasse à adopter, ou des cadavres dans des coins, ou encore un peu de magie dont je pourrais me nourrir ?

Mais rien. tout ce dont je suis sur c'est qu'un truc m'a tenu l'arrière du mon pull. Je baisse lentement les yeux sans pour autant éclairer, et la proximité du plus jeune ne me laisse qu'une explication, c'est lui qui m'a retenu. Vraiment ? Il pensait vraiment m’empêcher de tomber si je m'étais vraiment casser la gueule ? Un rictus en coin apparaît. Tiens donc. Il me tient le pull et ne lâche pas, comme une femme. Ne pars pas chéri j'ai peur ? Mon intérêt est piqué, mais le jeu ne serait pas intéressant si je lui montrais tout de suite. Il voit tout au plus un morceau de mon sourire léger quand je bouge la torche vers l'avant de nouveau. J'éclaire encore une fois à derrière mais rien ne nous suit, sinon je l'aurais coursé, juste pour l'attraper. La chasse, ça me manque. Putain, l'époque ou j'étais capable de traquer des heures durant la proie délicate de mon choix quand j'en avais marre d'attendre qu'un débile vienne me provoquer ou se perde sur mes terres, en dépit de tous les panneaux de danger que les paysans du coin avaient foutu partout. Y'a toujours des débiles pour aller juste derrière le panneau avec un « tu vois, il se passe rien ! » et là en général, soit leur corps se fait couper en deux, soit il se prend une balle, soit … en réalité, je leur ai tellement fait de choses aux frontières de mes terres, attendant planquer qu'un de ces abrutis ne testent, que je n'ai plus assez de mémoire pour tout énumérer. J'évitais quand même de trop les abîmer parce que pour les ramener en plusieurs morceaux à la maison après c'est chiant, fallait limité une de mes vaches morbides et des cordes pour tout traîner.

Et lui, il ose me tenir le pull en mode princesse en détresse ou  altruiste salvateur qui a peur que je me cogne la tête sur les rails. Remarque paie ton défibrillateur. Et là, je me dis que si je le cherche et joue avec lui et qu'il défaille , je pourrais toujours lui coller la main sur les rails électrifiés pour le ramener. Faudrait que je fasse visiter le tunnel à Nam Kyu, il trouverait ça pratique qui sait. Et heureusement que ma claustrophobie ne s'arrête qu'aux espaces confinés et étroits, pas au noir, sinon je serai d'une humeur encore plus instable.

Et ce signe qu'il me fait comme s'il se coupait la gorge alors que je l'éclaire, c'était pour me dire de me la fermer ou pour me dire qu'il peut pas en sortir une ? Il serait muet ? Sinon pourquoi ne dirait-il aucun mot ? Même les trouillards bronchent quand ils sont dans un tunnel sombre avec un inconnu qui fait deux fois sa carrure. Je le regarde pointer une pancarte, sans broncher, l'analysant attentivement, de haut en bas et quand il s'éloigne un peu , je mate son corps. Quoi, on s'occupe comme on peut. Je marche derrière lui, me disant d'un coup, qu'j'ai pas envie de sortir de ce tunnel tout de suite, surtout s'il ne peut pas crier. Mais lui ne sait pas qui le suit. S'il avait vu ce qui m'habite, ce que je suis, probablement que mon aura aurait léché les murs et avaler le plafond. Quand on arrive à la porte, quelque chose cloche. Sur la porte, j'éclaire, un panneau « En maintenance ». j'appuie sur la poignée, elle est bloquée. Bizarrement ce soit, je veux respecté les lois du moins niveau matériel. Non je ne force pas les portes. Pas ce soir. Hier un coup de pied de brute aurait suffi, quoi que c'est du métal là et qu'elle doit être fermé comme une porte coupe feu avec une barre d'acier derrière. L'idée de me péter la cheville m'enchante pas plus que ça, mais celle de lui péter autre chose m'effleure l'esprit. «Forcément... » que je dis en soupirant après notre échec. Oh oui je suis déçu... si dommage ! J'éclaire son visage, cherchant sa réaction mais un bruit qui vient de derrière lui me fait froncer les sourcils et des bruits suraigus. J'éclaire pour voir pas mal de rats grouiller dans un coin. Oh des copains ! L'idée du siècle. Je m'avance vers elle et me mort le doigt au sang, puis je m'accroupis et attend un peu. Quelques uns viennent mais avant qu'ils puissent me mordre, j'en attrape un de l'autre main et le juche sur mon épaule. Allez viens mon poto, on va terrifier le petit muet. Il peut pas crier, j'ai trouvé un nouveau jeu. Je reviens tranquillement. « Tu veux caresser Hannibal ? » Je m'approche de lui , petite créature attractive et frêle. Un peu plus prêt... surveillant ses genoux des fois qu'il veuille me castrer avec l'un d'entre eux. Non darlin' ça n'arrivera pas ça. « On fait quoi alors on continue de marcher... ? Il doit y avoir deux kilomètres ... » Je souris , la torche vers le sol, m'approchant un peu plus de lui, le rat squatte peinard mon épaule, la truffe au vent. "T'es muet c'est ça...?"

Ce n’était qu’un réflexe, rien de plus.
Après tout, Ha-Neul n’avait jamais été du genre à jouer les princes galant tentant d’aider les autres, mais l’idée de se retrouver avec un corps carbonisé après avoir rencontré les rails sur lesquels passait un courant monstre était loin de lui plaire. Comment il aurait expliqué ça à la police? Ah, ouais, il c’est étalé tout seul, alors qu’on qu’on devait pas être là? Mais bien sûr, on y croirait. Il hausse un sourcil avec légèreté. Oui, ce morceau de sourire ne lui a pas échappé, au contraire, et il ne sait pas encore comment l'interpréter. Il y avait probablement une histoire sous cet air, mais sincèrement, le jeune étudiant n’avait pas envie de creuser un peu plus profondément; ce mec n’était clairement pas le type innocent. Il avait quand même éclaté la gueule d’ados dans le métro avant de le traîner, lui, dans les tunnels sombres. Cet homme respirait la suspicion.

Sa main avait relâché le chandail après qu’il ait tenté de lui signifier son incapacité à parler, ramenant ses yeux sur l’inconnu après avoir pointé la pancarte. Il le….mattais ou quoi? Bref, peu importe; l’important c’était de sortir, parce que l’étudiant n’avait pas envie de passer la nuit dans cet endroit. C’est pourquoi il laisse l’inconnu marcher derrière lui alors qu’il se dirige vers la porte de sortie avec espoir. Mais évidemment le monde n’est jamais si gentil à lui laisser une quelconque chance dans la vie et ils se heurte à un panneau avec les deux mots les moins appréciés de la race humaine. Ha-Neul a un léger soupire, de mauvaise humeur, et jette un regard à l’homme lorsque ce dernier tente quand même de l’ouvrir, sans succès. Il fallait s’y attendre. La lumière revient vite éclairé son visage et le plus jeune met une main devant ses yeux avec frustration. Non mais, il va continuer d’essayer de le rendre aveugle? Heureusement, le faisceau lumineux ne reste pas longtemps en place lorsqu’un bruit attire l’attention de l’homme. Des rats. Bien sûr, il ne manquait plus que ça.

La suite se déroule sous les yeux dégoutés de Ha-Neul, qui est maintenant persuadé que cet homme est complètement fou et qu’il va devoir se retrouver à l’hôpital pour bénéficier d’un vaccin contre la rage. Mettre ses doigts devant ces bestioles, quelle horreur!  Pas qu’il avait quelque chose de particulier contre les rats en tant qu’animal, mais ceux traînant dans les recoins sales du métro, il y avait de quoi les éviter, ça c’était certain.Alors quand l’homme se rapproche avec le rat sur l’épaule, en offrant à Ha-Neul de le caresser, l’expression de dégoût sur son visage en est amplifiée, alors qu’il recule d’un pas. Ça tourne visiblement pas rond dans cette tête, n’est-ce pas? Même pour de l’argent, l’étudiant en histoire n’aurait jamais accepter de rapprocher ses doigts à cette bestioles surement pleine de maladie

À la question de l’autre, il a un vague haussement d,épaule. Continuer serait la meilleure solution, quitte à marcher jusqu’à la prochaine station. Il regarde autour, comme cherchant un chemin qui ferait du sens. Et quand l’inconnu lui demande s,il est muet, sa réponse se fait sans lui jeter un seul regard; un simple hochement de tête pour confirmer la supposition. Il pointe ensuite le tunnel, faisant signe de l’index et du majeur de continuer de marcher avant de commencer à s’éloigner. C’était toujours bien mieux de se mettre en chemin plutôt que de rester là à attendre comme des imbéciles.